De jeune peul désœuvré, à homme investi d’une mission : collaborateur de Christ parmi les siens
- SIM France-Belgique
- 23 mai
- 4 min de lecture
Qui aurait pu croire qu’un jeune peul, enraciné dans l’islam, formé à la madrasa, et entraîné dans la violence, deviendrait un témoin passionné de l’Évangile parmi les siens ? L’histoire de Woury*, c’est celle d’un retournement aussi brutal qu’inattendu. Une trajectoire marquée par les fractures, la faim, la solitude… et la grâce.

Woury naît au Burkina Faso, dans un village proche de la frontière malienne, au sein d’une famille musulmane peule. Il est l’un des neuf enfants. Aucun chrétien dans son entourage, aucune autre voie que celle tracée pour lui : l’islam, l’école coranique, la tradition.
À sept ans, son père meurt. Sa mère, veuve, décide de tout quitter pour retourner dans sa région d’origine, de l’autre côté du pays, près du Niger. Là-bas, Woury rejoint une nouvelle école… qu’il quitte vite. Il connaît déjà les enseignements dispensés. Avec l’accord de sa famille, il se lance dans un apprentissage : la mécanique automobile. Mais le garagiste ferme boutique, et le jeune garçon se retrouve désœuvré.
Alors, il glisse. Lentement. Il développe de mauvaises fréquentations. Ensemble, ils deviennent coupeurs de route, s’enfoncent dans la violence, participent à des rixes, parfois meurtrières. La mère de Woury, effrayée, réagit : elle l’envoie chez le grand frère du jeune adolescent, à la capitale.
Ce frère, artiste peintre, cache un secret : à Ouagadougou, il est devenu chrétien. Mais il tait sa foi pour éviter d’être rejeté par sa famille.
Un jour, alors qu’ils travaillent ensemble, une émission de radio interrompt le balai des pinceaux. Un imam connu dans tout le pays prêche. Il parle du jugement dernier et de la condamnation qui attend les infidèles. Ces mots secouent Woury. Il les a déjà entendus à la madrasa, bien sûr. Mais là… c’est comme si une lame lui transperçait le cœur. La peur du châtiment divin éveille en lui une question qu’il n’avait jamais osé poser : et s’il n’était pas prêt ?!
Chose cocasse, c’est la prédication d’un imam qui a suscité la quête spirituelle de Woury, l’amenant à découvrir le Dieu de la Bible !
Son frère voit l’agitation intérieure, et, dans un élan courageux, brise le silence : il lui parle de Jésus. D’un Dieu juste, mais aussi sauveur. Du pardon, de la paix. De la croix. Woury écoute, troublé. Il n’a jamais entendu cela. Il veut comprendre. Il va à l’Église.
Trois cultes. Trois rencontres. Et un jour, le déclic : Woury donne sa vie à Jésus. En secret.
Le pasteur, prudent, lui conseille de ne rien dire à sa famille. Woury retourne vivre dans son clan. Il prie en silence, assis parmi les hommes, pendant les prières islamiques. Mais très vite, le double-jeu qu'il mène lui devient insupportable. Il cesse d’aller à la mosquée. Alors, les regards changent. On l’interroge, on le flatte, on le tente : « Reviens. On t’aidera à trouver du travail. » Woury reste ferme. Alors viennent les insultes. Les menaces. Et enfin, l’exclusion. Le marabout du village tranche : « Nul ne doit manger avec lui. » Woury, désormais considéré comme un mécréant, est banni de la table familiale. Il erre aux alentours du village, cherchant de quoi subsister, comme des fourmis.
Réalisant que cette situation n’est pas viable, Woury fait un choix radical et difficile : il quitte son clan et décide de se débrouiller seul : « J’ai décidé de me battre, parce que je tenais à la vie… et que j’avais maintenant une espérance ! »
Ce choix n’a rien d’anodin et de facile, surtout dans un contexte peul où la communauté innerve toute la vie de l’individu. Mais Woury sait qu’il peut s’appuyer sur son Dieu qu’il apprend à connaître dans une relation intime et vivante. « Il m’a donné la force d’avancer. Il m’a rendu débrouillard. Aujourd’hui je connais une dizaine de métiers. » Partout où Woury passe pour travailler, il y trouve une assemblée chrétienne - le plus souvent issue de l’ethnie mossi majoritaire dans le pays - qui l’entoure, comme une famille.
Peu à peu, Woury comprend que Dieu ne l’a pas seulement sauvé de quelque chose, mais pour quelque chose. Il ressent l’appel à témoigner. Alors, il prend l’habitude de consacrer ses jeudis à l’évangélisation. Il va de village en village, distribue des traités, parle de Jésus, avec passion mais parfois encore avec crainte. Un jour, le verset de Luc 9.26 le frappe comme un coup de fouet : « Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles, le Fils de l’homme aura honte de lui, quand il viendra dans sa gloire... » Ce jour-là, Woury décide qu’il ne se taira plus jamais.
En 2004, un missionnaire brésilien croise sa route. Il l’encourage à concentrer ses efforts vers les Peuls : « Tu es l’un des leurs. Qui mieux que toi pour leur parler ? » Woury comprend : sa langue, sa culture, son nom, sont des clés que Dieu lui a confiées pour ouvrir les cœurs les plus méfiants.
Plus tard, il s’installe au Niger, animé par un projet entrepreneurial. Dans une Église locale, il rencontre le pasteur de Maria*, une missionnaire européenne installée dans le pays. Ce pasteur lui fait part des besoins d’un évangéliste peul dans sa ville. Woury répond à l’appel et s’y installe. Lui et Maria se rencontrent et apprennent à se connaître en travaillant ensemble dans le ministère parmi les enfants. Ils se rapprochent et décident de se marier, en 2022. Le désir de Woury était de trouver une femme qui serait investie comme lui dans le ministère. Dieu a répondu.
Aujourd’hui, Woury et Maria sont engagés avec SIM WAMO, le bureau missionnaire d’Afrique de l’Ouest. Ils explorent de nouvelles possibilités de ministère dans un pays de cette région.
L’enfant orphelin, le jeune désœuvré a laissé derrière lui les ténèbres d’une vie sans but. En Christ, il a trouvé la paix, un appel, une mission. Et il avance, fervent et confiant comme témoin fidèle, pour faire briller la Lumière de Christ au cœur même de son peuple, les Peuls.
*prénoms modifiés pour préserver l’anonymat des personnes. Woury signifie « vivant » en peul.
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