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Photo du rédacteurSIM France-Belgique

Encourager les équipiers terrain et les aider à réaliser l'action de Dieu en eux

Un peu plus d'un an après le début de sa collaboration avec SIM France-Belgique, Sheena revient sur le ministère d'accompagnement pastoral, ses effets sur les équipiers et les enjeux de ce rôle. Entretien



Bonjour Sheena, ça fait maintenant un an que tu as rejoint l’équipe de l’accompagnement pastoral du bureau SIM France-Belgique. Comment as-tu vécu cette première année de ministère ?

Cette première année a été intense et riche en apprentissages pour diverses raisons. Quand j’ai intégré le pôle d’accompagnement pastoral – nous sommes une équipe de quatre, dont deux qui travaillent à distance – ma plus jeune fille n’avait que trois mois. Le bureau venait de traverser plusieurs périodes de transitions, dont la dernière était le changement de directeur. Et même si le suivi de missionnaires ressemblait à celui que je propose à tout chrétien, il y avait des différences non-négligeables que je devais assimiler. Très rapidement, j’ai aussi dû accompagner des situations de crise : tremblement de terre, intervention de police secrète, crise du Niger cet été, et maintenant période « chaude » en Mayotte, qui sont plus demandeuses en énergie.

Or, ce que je retiens de cette première année, ce sont les liens forts de collaboration qui se sont créés avec des coéquipiers de SIM autant à l’international qu’au bureau, et les relations de confiance que j’ai pu tisser avec les missionnaires. Je suis quelqu’un qui aime travailler avec une équipe transculturelle pour aider le corps de Christ à accomplir sa mission en tant qu’unité diverse avec un même objectif : faire connaître Christ là où il est le moins connu, peu importe si ce sont des poches de résistance dans le cœur de Ses disciples, ou des zones non-atteintes sur notre terre. Voir ce que le Seigneur peut faire, à travers nous et nos missionnaires sur le terrain, quand nous sommes prêts à mourir à nous-mêmes et laisser Christ prendre forme en nous, a été un grand sujet d’encouragement durant cette première année.


D’après les retours que tu as eu sur l’accompagnement pastoral du bureau, peux-tu nous expliquer le rôle que ce ministère peut jouer dans la vie d’un(e) missionnaire ?

Je dirais que notre rôle est légèrement différent entre nos missionnaires long-terme et court-terme. Pour les court-terme, dont j’ai principalement la charge, le travail de préparation et l’accompagnement dans les premiers mois d’adaptation sont très important. Ce sont des phases charnières qui définissent la manière dont un missionnaire, et son équipe d’accueil, vivent son engagement transculturel par la suite. Ces temps de transitions peuvent être déstabilisants, et on souhaite soutenir nos envoyés un maximum pour les amener dans une confiance plus grande en Christ premièrement, et ensuite en Son corps qui est appelé à porter ces fardeaux des premiers pas avec eux. Le débriefing a également un très grand impact. On les aide à « digérer » ce qu’ils ont vécu et à voir les graines que Dieu a semé dans leurs propres cœurs, et à travers leur ministère. Si le/la missionnaire le souhaite, on peut aider à arroser ces graines de réflexion sur leur engagement par le biais d’un mentorat qui continue après leur retour.

En ce qui concerne les missionnaires long-terme, notre désir est de leur donner un espace d’écoute, d’échange, de prière et de conseil qui leur permet de partager leurs joies et leurs peines, pour repartir avec « une bouffée d’air frais » (comme une missionnaire l’a récemment formulé) et un regard renouvelé. Souvent ce sont des leadeurs d’équipe qui n’ont pas forcément la possibilité de confier leurs fardeaux à des personnes sur place, ou ils ont besoin de quelqu’un d’extérieur à la situation, mais familier avec leur culture d’origine, pour discuter et prier en toute confidentialité. En temps de crise, nous intervenons de manière plus conséquente pour les aider à survivre à la première onde de choc, et ensuite récupérer, âme, corps et esprit, avec le moins de séquelles possibles.


Avant de rejoindre l’équipe du bureau, tu travaillais déjà – et tu y travailles toujours – dans l’accompagnement pastoral, sous la forme de counseling biblique par la prière (Prayer Ministry). Peux-tu nous illustrer comment ton expérience dans ce domaine inspire ton approche, et quelles sont les différences ?

La différence la plus frappante est que les missionnaires sont premièrement là pour servir d’autres, et non pas pour recevoir un ministère de notre part. Souvent, je dois leur rappeler l’importance de s’arrêter pour recevoir, afin de pouvoir être et rester disciple eux-mêmes avant d’en faire (les deux étant d’une importance égale et complémentaire). Leur contexte de vie est aussi plus stressant*, et je suis reconnaissante d’avoir pu effectuer des voyages missionnaires moi-même pour mieux comprendre les enjeux que cela engendre.

Cependant, je dirais que ma formation initiale m’aide à savoir écouter avec discernement et compassion, à rester dépendante du Saint-Esprit pour la direction de mes conversations, et à proposer un regard et/ou des outils qui aide chacun, peu importe si c’est un missionnaire expérimenté ou un chrétien jeune converti, à puiser plus profondément dans la vie de « Christ en nous, l’espérance de la gloire » (Col 1,27).

*le « stress d’adaptation » à une autre culture est une de plus grandes sources de stress qui peut persister au-delà de la première phase d’adaptation


Le bureau SIM France-Belgique organise également une retraite spirituelle pour ses missionnaires. Quels sont les bénéfices de ces temps pour eux, et aussi pour toi dans ton rôle ?

L’isolation est un de plus grand piège de l’ennemi pour chaque chrétien. Pour les missionnaires qui quittent leurs familles, leurs églises et leurs amis, il est particulièrement présent. Ces temps de retraite (comme d’ailleurs de rencontre mensuelle par zoom) leur permettent de voir qu’ils font partie d’une même famille missionnaire, et de renforcer les liens entre co-équipiers transculturels.

Pour moi en tant qu’accompagnatrice, la retraite me donne du temps de qualité avec les missionnaires en présentiel, ce qui est plus propice à des échanges en confidentialité où ils peuvent être vulnérables et partager des besoins plus difficiles. Bien sûr que c’est aussi un temps de retrouvailles joyeux avec des jeux, des sorties et des moments conviviaux autour de la table, qui nous permettent de rire ensemble et d’échapper à nos quotidiens missionnaires chargés.


Il y a de plus en plus d’organisation missionnaire qui propose un accompagnement pastoral. Quel est votre approche et votre vision pour les personnes accompagnées par SIM ?

Evelyne a été vue comme une pionnière lorsqu’elle a commencé à proposer un accompagnement régulier et proactif à tout missionnaire à partir de 2010. Plusieurs organisations n’offrent qu’un accompagnement de ministère, ou de crise (souvent par manque de ressources) qui intervient seulement lorsque l’envoyé rencontre « officiellement » des problèmes et que c’est souvent déjà trop tard. Je suis reconnaissante qu’Évelyne ait amené cette vision. Comme on le dit si bien en français, « mieux vaut prévenir que guérir », et cela s’applique aussi à nos missionnaires. Cette approche enlève également la stigmatisation - à laquelle je m’oppose activement – qu’un missionnaire suivi est un missionnaire qui va mal ou qui est moins mature/fort. Personnellement, je choisis de continuer un suivi par mon organisme de formation Elijah House. Comment voulons-nous être transformés à être sel et lumière si nous ne sommes pas prêts à demander conseil à une personne de confiance, à inviter son regard bienveillant sur nos vies, et à échanger de manière authentique sur nos luttes et nos victoires ? Un accompagnement ne résoudra pas tous les problèmes (souvent relationnels), mais il peut nous en éviter et nous équiper à mieux y faire face, pour notre propre bien et le témoignage du corps de Christ dans ce monde brisé.


Après cette année, te vois-tu rester engagée avec le bureau à long-terme ? Quels objectifs recherches-tu à titre personnel pour ton ministère ici en France et au loin ?

Avant que certains membres du bureau m’approchent pour me proposer ce poste, je n’avais jamais pensé à exercer l’accompagnement pastoral dans le cadre de la mission transculturelle, mais aujourd’hui, je ne pourrais pas m’imaginer un meilleur endroit pour servir avec mes dons. Dieu avait clairement de meilleurs projets pour moi. Grâce à l’équipe, autant internationale que locale, je me sens à ma place et bien entourée pour faire face aux défis que ce genre de ministère peut amener (Compassion fatigue, Burnout, épuisement transculturel, sur-sollicitation par manque d’autres ressources etc). Je suis reconnaissante de pouvoir grandir dans des domaines de compétences très variés, comme l’écriture ou l’enseignement, et d’avoir la possibilité de continuer à me former, par exemple pour l’accompagnement des enfants missionnaires (« enfants de troisième culture »/MK).

A titre personnel, je veux vivre davantage avec une vision missionnaire pour la France, car Dieu m’a amené à quitter mon pays d’origine – l’Autriche - pour venir servir Son peuple ici. Je prends de plus en plus conscience de l’indifférence et de l’endormissement qui règnent en France par rapport au monde spirituel, et l’obstacle que cela représente pour annoncer l’Évangile. J’aimerais trouver des manières créatives et plus adaptés à ce contexte pour partager la Bonne Nouvelle autour de moi et édifier l’Église, et je suis convaincue que le lien avec la mission au loin y joue un rôle primordial. C’est en devenant membre plus actif de l’Église universelle que l’Église en France pourra véritablement grandir, car le corps de Christ dépasse les frontières, et la puissance de l’Évangile franchit les barrières culturelles et linguistiques.


Tu es aussi maman de deux petites filles, comment vis-tu les défis de combiner ta vie de famille avec des enfants en bas-âge avec les demandes d’un tel ministère ?

J’essaie de limiter mon temps de travail à deux, maximum trois jours par semaine, et en quelque sorte « d’oublier » mon travail à la maison pour être pleinement présente avec elles et mon mari. Bien sûr que je continue à porter les missionnaires dans mes prières pendant les autres jours de la semaine et que je reste disponible par texto ou mail le soir, mais lorsque je suis avec eux, je laisse tout ce qui peut me préoccuper dans les situations que j’accompagne à Jésus. Dans ce genre de ministère, cela peut être un très grand défi, mais jusque-là je suis reconnaissante de la manière dont je me suis appuyé sur Dieu et lâché prise. Pour ma famille, je suis irremplaçable, et même si beaucoup de missionnaires comptent aussi sur moi, je ne jouerai jamais le même rôle pour eux, surtout comparé à ce temps formateur de la petite enfance de mes filles. Je me rappelle donc cette vérité lorsque je décide à quoi donner la priorité, sans que cela n’ait nui à l’accompagnement que je propose.


Un moment fort de cette année qui s'achève ?

Définitivement mon voyage au Moyen Orient. Ceci m’a permis de voir de mes propres yeux le coût que les chrétiens paient pour annoncer l’Évangile dans un pays qui s’y oppose secrètement, mais activement.


 

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