De 22 ans jusqu’à sa mort à 73 ans, Hudson Taylor dédia sa vie au partage de l’Évangile en Chine. Sa consécration à l’appel que Dieu avait mis sur son cœur et sa confiance en son Seigneur étaient les marqueurs de son service. La mission qu’il a fondée, CIM (aujourd’hui OMF), poursuit dans sa vision, en apportant la bonne nouvelle en Asie du sud-est.

[SÉRIE - MISSIONNAIRES : CES PERSONNES ORDINAIRES QUI ONT RÉPONDU À L'APPEL D'UN DIEU EXTRAORDINAIRE]
Né dans une famille chrétienne, James Hudson Taylor vint à Christ à l’âge de 17 ans, suite aux prières d’intercession ardentes de sa mère et sa sœur. À compter de ce jour il avait un grand zèle pour le Seigneur et passait beaucoup de temps en sa présence. Malgré cela, il luttait péniblement face aux nombreuses tentations qui s’offraient à lui. Il promit à Dieu que si celui-ci l’aidait, lui donnant la victoire en Christ, il ferait tout ce qu’il lui demanderait. C’est alors qu’il reçut la conviction que Dieu l’appelait à être missionnaire en Chine. Dès ce moment, malgré son jeune âge, il se mit à se préparer pour la mission. Il fit plus de sport, changea son matelas confortable pour un matelas dur et s’imposa de ne pas trop manger à table. Il arrêta aussi d’aller au deuxième culte du dimanche, afin de visiter les démunis et partager l’évangile avec eux. Il commença aussi à apprendre le mandarin, à partir d’une copie de l’évangile de Luc, ainsi que le grec, le latin et l’hébreux.
Il voulut étudier la médecine et déménagea pour devenir assistant d’un médecin réputé et faire de l’évangélisation dans un quartier défavorisé. Le salaire qu’il recevait du médecin était suffisant pour couvrir ses besoins, mais il se rendit compte qu’en réduisant son niveau de confort il pourrait donner plus pour l’œuvre du Seigneur et à ceux qui étaient dans le besoin. C’est ainsi qu’il quitta la maison confortable de sa tante pour louer une chambre dans un quartier pauvre et insalubre de la ville. Il changea son alimentation, évitant les articles de luxe tels que le beurre et le lait. Grâce à ce dépouillement volontaire, deux tiers de son revenu lui restaient pour les bonnes œuvres. Cette grande générosité s’accompagnait d’une grande joie. Il dit plus tard : « je n’ai jamais fait de sacrifice », en effet, pour chaque chose qu’il laissait volontairement pour suivre le Seigneur, il avait toujours l’impression de recevoir plus de Dieu.
Une expérience de don total
Cependant, il éprouvait une certaine hésitation à partir en mission. Il savait que, une fois en Chine, il ne pourrait que dépendre de Dieu pour subvenir à ses besoins. Il ne doutait pas de la capacité de Dieu à pouvoir, mais craignait que la foi lui manquerait. Il décida donc qu’il devait renforcer ses muscles spirituels avant de partir. Pour ce faire, il s’obligea de ne plus rappeler à son employeur de lui payer son salaire, comme ils l’avaient convenu, mais de prier que Dieu le lui rappelle. Il advint de cette résolution qu’un jour Taylor se retrouva avec une dernière pièce en sa possession d’une demi-couronne.
Le lendemain, un dimanche, un homme pauvre lui demanda de venir prier avec sa femme qui était mourante. Cet homme n’avait pas pu faire venir le prêtre car il n’avait pas de quoi le payer. Taylor pensa alors à sa pièce restante, mais ne pouvait imaginer la lui donner, étant donné que c’était sa dernière. Il écrivit plus tard : « la vérité était simplement que je pouvais faire confiance à Dieu plus un shilling et six pence, mais n’étais pas prêt à faire confiance à lui seul, sans argent du tout dans ma poche ». En arrivant à leur maison et voyant l’état dans lequel se trouvaient les enfants dénutris, ainsi que le nouveau-né et la mère à bout de forces, Taylor fut une fois de plus interpellé, mais ne put là-encore se décider à se séparer de sa pièce. En essayant de les réconforter, il se sentait de plus en plus coupable : « tu leur parles d’un Père d’amour dans le ciel, mais toi-même tu n’es pas prêt à lui faire confiance pour une demi-couronne ! ». Finalement, après la prière, le père de famille lui demanda s’il ne pouvait pas les aider. À ce moment-là, Taylor entendit Dieu lui dire « donne-lui ce qu’il te demande ». Il lui donna enfin la demi-couronne et la joie l’envahit à nouveau.
Il rentra chez lui, le cœur insouciant, chantant sur le chemin du retour, sans pour autant savoir d’où aller venir son repas le lendemain. Il confia sa situation à Dieu et se coucha. Le lendemain matin, avant de finir le peu de bouillie d’avoine qui restait du soir précédant, une lettre arriva. En l’ouvrant, il y trouva un demi-souverain, d’une valeur quatre fois plus importante que la pièce qu’il avait donné la veille. Ceci renforça la foi de Taylor. Il y eut d’autres moments comme celui-ci, où sa foi fut durement éprouvée et où Dieu répondit de manière miraculeuse. Tout cela lui donna l’assurance qu’il pouvait vraiment partir en Chine.
C’est ainsi qu’à 20 ans, Taylor partit à Londres où il devint étudiant en médecine. Il continua à vivre entièrement dépendant de la provision de Dieu, afin de se préparer davantage à son départ (hormis les frais de scolarité, pris en charge par la société missionnaire). Les réponses de Dieu pendant ce temps fortifièrent sa foi. À peine un an plus tard la Société d’Evangélisation Chinoise lui demanda de partir dès que possible, coupant court ses études de médecine. Une lettre qu’il écrivit à sa mère à cette occasion montre qu’il avait conscience en partant qu’il risquait de ne pas revenir pas en Angleterre. Taylor ressentait un mélange de joie, mais aussi de douleur avec la séparation d’avec les siens.
En Chine, au plus près des habitants, pour faire une différence
Il arriva en Chine en 1854, après 5 mois en bateau. C’était la guerre civile, et les étrangers n’avaient le droit de se rendre que dans cinq ports. Même à Shanghai, l’évangélisation était périlleuse. De ses fenêtres Taylor pouvait voir les combats et une misère telle qu’il n’avait jamais vu auparavant. La vie était difficile, le grand froid, sans possibilité de chauffage, le faisait souffrir. Il était reconnaissant pour l’entrainement qu’il avait eu avant de partir, même si les conditions restaient extrêmement difficiles. De plus, il éprouvait de grandes difficultés financières, surtout à cause du niveau de vie d’autres missionnaires qui l’accueillaient. À ceci s’ajouta un fardeau supplémentaire : il entendit qu’une famille était déjà en route pour le rejoindre et se rendit compte de la nécessité de leur trouver un logement, malgré son absence de moyens. Ce fut un temps, où, selon ses mots, tout comme Pierre, il avait trop tendance à porter ses regards sur les vagues plutôt que sur Christ. Il trouva finalement une maison qu’il put louer, parmi le peuple chinois, où il s’installa 6 mois après son arrivée. La maison se trouvait au-delà de la protection de la colonie, et à portée de l’artillerie impériale, d’où le faible coût du loyer. Après 3 mois dans ces conditions dangereuses, il dû quitter l’endroit et se réfugia dans la propriété de la Société Missionnaire de Londres, où une propriété devint vacante, juste avant l’arrivée des Parker. Il sous-loua une partie de la maison, laissant 3 chambres à partager entre lui et la nouvelle famille. Pendant tout ce temps Taylor se dédiait aussi à l’apprentissage de la langue et l’évangélisation. Malgré ces difficultés, Taylor s’aventura à l’intérieur du pays pour 10 voyages missionnaires répartis sur 15 mois. Il ressentait un fardeau pour les personnes au-delà des limites de la colonie, les peuples sans accès à l’évangile.
Pendant ces voyages, Taylor se rendit compte de l’utilité de son matériel médical pour ouvrir le cœur des gens, mais remarquait aussi une certaine hostilité. Il décida, afin de faciliter l’évangélisation, d’adopter les habits chinois, ainsi que la coiffure. S’habiller entièrement comme un chinois impliquait un rejet par les occidentaux, dont les autres missionnaires, pour qui pareille chose était impensable. Il loua une maison dans un quartier chinois, se fit couper et teindre les cheveux et y attacha une tresse. Il choisit de porter les habits d’un enseignant chinois. Ce choix transforma son évangélisation, ouvrant les portes et réduisant les barrières. Il se focalisa de nouveau sur l’intérieur du pays. Son accueil là-bas était maintenant chaleureux, comme s’il était l’un des leurs. Il rencontra un autre missionnaire avec la même vision d’atteindre les peuples alentours. Ils se mirent à voyager en bateau, ayant chacun un missionnaire chinois avec lui.
Taylor appris que l’indemnité qu’il touchait en Chine provenait d’argent que la mission en Angleterre avait emprunté. Par acquis de conscience, il quitta l’organisation. Il disait que Dieu ne manquait pas de ressources, et que donc, si les ressources manquaient, ce ne devait pas être là le travail de Dieu. Sa foi fut régulièrement éprouvée, et par moment elle faillit même, mais Dieu resta fidèle et pourvut toujours pour ses besoins, notamment en permettant son mariage à Maria Dyer, qui lui fut d’une grande aide et un encouragement dans son travail.
Taylor continuait son travail d’évangélisation, mais il savait ce n’était pas à lui de faire le travail seul. Pour que la Chine soit atteinte pour l’évangile, il fallait que l’église chinoise porte cette Bonne Nouvelle. Les nouveaux convertis ne recevaient pas de salaire pour l’enseignement de la parole et l’évangélisation. Cette décision, bien que ralentissant le travail, étant donné que chacun devait gagner son pain, permit néanmoins qu’ils ne soient pas dépendants des occidentaux. Les journées de Taylor étaient bien remplies. En outre l’évangélisation, ce dernier continuait son travail médical, l’enseignement des nouveaux convertis et une correspondance avec l’Angleterre. De plus, un collègue missionnaire dû quitter la Chine, laissant l’hôpital qu’il y avait construit. Suite à sa demande, Taylor pris la direction de l’hôpital et un nombre des nouveaux croyants vinrent l’aider dans ce travail. Les patients y étaient traités gratuitement, Taylor et ses amis durent donc continuellement s’appuyer sur Dieu pour leurs besoins ainsi que ceux de l’hôpital. Ce travail porta des fruits et ils eurent la joie de baptiser certains de leurs patients.
Un ancien bouddhiste lui demanda : « Depuis combien de temps avez-vous cette Bonne Nouvelle dans votre pays ? », il répondit : « Depuis quelques centaines d’années. » « Comment ça, des centaines d’années ? Mon père a cherché la vérité, mais il est mort sans la trouver. Pourquoi n’êtes-vous pas venus plus tôt ? ». La peine que Taylor éprouva en entendant ces mots renforça son ardeur pour amener la Bonne Nouvelle là où elle n’était pas connue.
Toutefois, tout ce travail, ainsi que le climat, pesaient sur la santé de Taylor, dont les forces s’épuisaient. C’est ainsi qu’après 6 années en Chine, il rentra en Angleterre avec sa famille, où il s’installa à Londres et reprit ses études de médecine, dès que sa santé le lui permit. Il travaillait aussi sur une révision du Nouveau Testament Ningpo et passait du temps à effectuer des recherches sur la Chine plus globalement. Alors qu’il cherchait à encourager d’autres missions à envoyer des missionnaires en Chine, il sentit de plus en plus qu’il devait lui-même y retourner. Il accepta de prendre un rôle de leader et fonda une nouvelle mission appelée China Inland Mission, CIM (aujourd’hui OMF). Monsieur Berger allait en être le responsable en Angleterre et Taylor en Chine. Un des principes clés de cette mission était de ne jamais faire de demandes de fonds, mais de tout remettre à Dieu, pour que lui touche les cœurs. De ce fait, nulle indemnité n’était promise aux candidats autre que l’assurance que leur foi leur offrait. L’idée de mission basée uniquement sur la foi était assez nouvelle et permit de limiter les candidats à ceux uniquement qui étaient prêts à dépendre entièrement de Dieu.
Malgré l’énorme pas de foi demandé, 16 missionnaires partirent pour la Chine, avec 4 enfants. Taylor, à 34 ans, était le plus âgé du groupe. Tous ces missionnaires adoptèrent les habits locaux et d’autres missionnaires se joignirent à eux. Pourtant, la discorde grandissait entre les premiers missionnaires. À cela s’ajouta une difficulté plus grande : la fille ainée des Taylor mourut, âgée de 8 ans. Taylor reconnut que c’était un prix qu’il avait accepté de payer en allant en Chine. C’était une grande douleur, mais en même temps il savait qu’ils avaient fait le bon choix de partir. Suite à cet évènement douloureux le couple redoubla leurs efforts d’évangélisation, en particulier vers l’intérieur du pays : ils ouvrirent de nouvelles stations missionnaires, ce qui ne fut pas sans danger.
Une passion à toute épreuve
Le couple eut un dernier enfant en 1870, mais Mme Taylor, atteinte de choléra, ne put l’allaiter et il mourut âgé de deux semaines. Sa mère le suivit quelques jours plus tard, âgée d’à peine 33 ans. Ceci fut une lourde épreuve pour Taylor. Cependant, malgré sa douleur et son chagrin, Taylor put continuer à faire monter à Dieu sa reconnaissance. En 1872, Taylor rentra en Angleterre pour prendre la relève des Berger. Il se remaria puis repartit en Chine 15 mois plus tard. Il visita toutes les stations pour encourager les missionnaires et chrétiens autochtones. Il chercha aussi des leaders chinois dans chaque endroit. Il voyait les missionnaires étrangers comme un échafaudage autour d’un bâtiment en construction : quelque chose qui devait être démonté dès que possible pour le remonter ailleurs. En parallèle les défis financiers continuaient avec une baisse considérable de l’intérêt et le soutien pour la mission en Chine.
La vingtaine d’années suivante fut répartie entre le travail en Chine et les voyages en Angleterre, aux Etats-Unis, au Canada, en Scandinavie, en Australie et en Nouvelle Zélande. Des appels à la prière pour plus d’ouvriers, ainsi que ces voyages, eurent pour résultat l’envoi de nouveaux missionnaires en Chine. La femme de Taylor avait aussi un rôle important : elle formait les femmes missionnaires qui arrivaient et ainsi joua un rôle central dans l’ouverture de la mission au femmes célibataires, qui, jusque-là, était réservée aux femmes mariées. Ainsi, Dieu continua de pourvoir autant en missionnaires, qu’en ressources pour subvenir aux besoins de ces derniers.
Puis 1900 arriva, une année très difficile pour la mission. La révolte des Boxers (1899-1901), qui visait tout ce qui venait de l’occident, notamment les missionnaires et les Chinois convertis au christianisme, battait de son plein. Les occidentaux, principalement les missionnaires, et les chrétiens chinois étaient entre autre tenus comme responsables pour plusieurs désastres naturels qui eurent lieu les années précédentes, et pour la famine locale qui s’ensuit. À ceci s’ajoutait une tension politique avec les gouvernements occidentaux voulant chacun ‘leur part du gâteau chinois’. Des combats éclatèrent, avec des représailles. Taylor était en Europe lorsqu’il reçut la nouvelle : des émeutes, des massacres. En tout, 136 missionnaires protestants furent tués et environ 2000 protestants chinois. En 1900, la CIM perdit 58 de ses missionnaires et 21 enfants. La nouvelle faillit anéantir Taylor. Il dit « Je ne peux pas lire, je ne peux pas prier, je ne peux à peine penser – mais je peux faire confiance en Dieu ». Une fois la crise passée, en 1905, âgé alors de 73 ans, Taylor partit une dernière fois pour la Chine. Il alla de station en station pour réconforter et encourager les missionnaires, mais surtout les chrétiens chinois qui le reçurent tel un héros, lui qui avait donné sa vie pour leur amener l’évangile. Ce fut son dernier voyage, il mourut en Chine et fut enterré auprès de sa première femme, dans la terre qu’il avait aimé depuis tant d’années.
À la suite d'Hudson Taylor, SIM France-Belgique intègre la contextualisation de l'Évangile dans son approche missionnaire. La contextualisation de l'Évangile consiste à communiquer le message de Jésus-Christ de manière compréhensible et pertinente dans une culture spécifique, tout en restant fidèle à son message biblique. Cela implique de prendre en compte les langues, les valeurs, les croyances, et les pratiques culturelles des destinataires pour éviter les incompréhensions ou les impositions culturelles inutiles. L'objectif est de permettre aux gens de comprendre et de répondre à l'Évangile dans leur propre cadre de référence.
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